rien de nouveau sous le soleil mais j'vous pose ça là
Christophe Maé, l'insatisfait
Le chanteur originaire de Carpentras revient sur scène avec son quatrième album "L'attrape-rêves"
On l'avait rencontré cet été dans un hôtel à Marseille, le visage bruni par le soleil. Il venait de passer une journée chez lui, au bord de sa piscine. Détendu, il voyait la France en finale de l'Euro (une prophétie qui s'est vérifiée) et s'impatientait de renouer avec la scène. En mai dernier, Christophe Maé, qui a écoulé 3 millions de disques au total, a sorti son 4e album L'Attrape-rêves, "plus adulte" selon lui. A 41 ans, le chanteur serait-il plus serein ?
Pour votre précédent album, vous aviez trouvé l'inspiration en Louisiane. Quel a été le processus de création cette fois-ci ?Christophe Maé : Cette fois-ci, je suis resté à la maison. Je n'ai pas eu besoin d'aller bien loin. Je me suis juste nourri de ce que je vivais. Voir mes enfants grandir, d'où cette chanson Marcel (prénom de son deuxième fils né en 2013, ndlr) dans laquelle je parle de la transmission et du temps qui passe. Je suis souvent absent, donc par rapport à ma famille, cela me travaille forcément. Ce n'est pas de la culpabilité mais cela me chagrine. C'est pour cela qu'il y a une certaine urgence, une mélancolie, dans cette chanson. Après, l'inspiration peut aussi venir d'un repas entre potes, comme pour le titre Les amis qui porte un regard cynique sur l'amitié. Vous voyez, je me suis laissé porter ou emporter sur cet album.
Vous avez désormais un appartement à Paris. Pourquoi ?C.M. : J'ai fait beaucoup d'allers-retours à Paris pour composer l'album. Il y a une énergie que je ne retrouve pas ici. Ici, je m'endors. J'adore la nonchalance mais il faut que j'ai l'esprit tranquille. Et puis, travailler à la maison avec ses enfants, c'est difficile. Je culpabilisais parce que je n'étais pas là à l'heure du bain ou du repas. Donc maintenant, je passe quatre jours à Paris pour faire ma musique et quand je rentre je suis disponible pour eux. Je me sers du train comme d'un sas de décompression. Je privilégie la qualité des moments.
Vous ne délaissez donc pas le Sud ?C.M. : Non ! Moi, je suis un enfant du pays !
Parvenez-vous à concilier votre vie privée et publique ?C.M. : Je fais au mieux. Etre un bon papa, un bon mari et un bon musicien, ce sont mes préoccupations principales. Quand j'arrive à me regarder en disant que "ça va, c'est pas mal", c'est déjà un grand pas.
Le disque est co-signé avec un certain Paul Ecole...C.M. : J'ai fait une rencontre décisive avec Paul Ecole qui a une plume magique. J'ai co-écrit presque tous les titres avec lui. C'est un pote qui m'a envoyé ses textes. Et j'ai craqué sur Lampedusa qui aborde la question des migrants.
Le disque mêle en effet préoccupations personnelles et regard sur le monde extérieur.C.M. : Je parle de choses personnelles mais qui deviennent universelles. Parce qu'on vit tous les mêmes choses. Quand je chante Il est où le bonheur ?, c'est une piqûre de rappel qui s'adresse aussi aux autres. Quant à Lampedusa, personne ne peut rester indifférent et insensible à ce qui se passe. Tous ces gens qui quittent leur terre, qui rêvent d'un Eldorado et qui vont rencontrer la mort.
Pour revenir à cette chanson "Il est où le bonheur ?", est-elle autobiographique ?C.M. : C'est carrément mon histoire. J'ai toujours été comme ça. C'est un long travail sur soi-même pour savoir profiter et apprécier ce qu'on a. Etre dans l'acceptation, le contentement. Mais cela concerne la majorité des gens. Je pense être dans le vrai avec cette chanson.
Le disque est bien reçu. Vous devez être rassuré...C.M. : C'est magnifique. Je suis ravi. C'est mon quatrième album qui marque un virage. Il est plus adulte. Et ce n'est pas évident de réussir ces transitions. Je profite d'ailleurs de cette interview pour remercier l'immense cadeau que me font les gens depuis une dizaine d'années.
Est-ce qu'aujourd'hui vous êtes satisfait de votre vie ?C.M. : Ah, ça vous intrigue ! Ma famille, mes enfants vont bien. Je croise les doigts. J'ai conscience que je suis un privilégié. Je vis de ma musique. Je n'ai pas trop le droit de me plaindre. Mais j'ai aussi mes tourments. Ce n'est pas un long fleuve tranquille. Je me pose beaucoup de questions. C'est un métier prenant, passionnant, mais j'ai toujours cette crainte de la page blanche. A chaque nouvel album, il y a ce passage à vide. Aujourd'hui, je suis très heureux de ce disque. Mais je suis déjà sur la tournée. Je n'ai pas d'agent ni de manager. Je me débrouille...
C'est un choix ?C.M. : Oui. Je suis à l'écoute mais c'est moi qui suis sur scène. Alors, sur la tournée, qui mieux que moi peut imaginer la mise en scène du spectacle, l'ordre des chansons, les entrées et sorties... J'ai toujours un ou deux regards extérieurs bienveillants. Mais c'est moi qui déclenche.
Est-ce pour être libre ?C.M. : A la base, je fais ce métier pour être libre. J'ai toujours couru après la liberté.
Vous commencez par un "pré-tour". Suivra ensuite la tournée des Zénith...C.M. : C'était ma volonté de commencer par des salles intermédiaires de 1 000 à 1 500 personnes. En 2017, ce sera un plus gros show avec un décor et plus de musiciens. Cela fait 10 ans que j'ai la chance de jouer dans des Zénith. Etre dans des salles plus petites, c'est un autre exercice très plaisant. C'est un peu comme à la maison. Il y a une interaction plus forte avec le public. Et puis, c'était aussi pour répondre à une demande de mon public.
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